CHATGTP : une boîte de pandore?

Certain.e.s lui font réciter des vers. D’autres lui demandent un plan de nutrition, une discussion de la Shoah, le programme d’un logiciel, une dissertation, des versets bibliques, voire, un avis destiné aux autorités. Les possibilités de ChatGPT semblent illimitées et pourraient bouleverser le milieu juridique.

ChatGPT est un robot conversationnel conçu par OpenAI, à qui l’on doit le générateur d’images DALL•E, dont la mission est de développer un système d’intelligence artificielle « sûr et bénéfique1 ». Comme l’indique son nom, il relève d’un modèle de traitement du langage appelé Generative Pretrained Transformer 3.5. Ses 175 milliards de paramètres en font l’un des modèles les plus puissants à ce jour2. Sur demande, il se décrit ainsi :

ChatGPT est un modèle de langage de grande taille formé par OpenAI. Il est capable de générer du texte en fonction des contextes et des prompts donnés. Il est utilisé pour la génération de contenu, la compréhension de la langue naturelle et d’autres tâches liées au traitement du langage3.

Ses limites : il ne peut naviguer sur Internet ou accéder à de l’information qui dépasse celle qu’il a apprise, laquelle arrête en 2021. La précision de ses réponses varie selon les mots qu’emploie son interlocuteur.trice. Par exemple, selon qu’on lui demande comment une chose s’est produite ou d’expliquer comment elle s’est produite, la réponse sera plus détaillée dans le deuxième cas.

S’il offre des ressources à quiconque ose l’essayer, il énonce d’emblée « avoir pour objectif de recueillir des commentaires pour améliorer ses systèmes et les rendre plus sûrs4. » Ses concepteur.trice.s ajoutent que les mesures de protection n’empêchent pas le robot de générer du contenu incorrect, trompeur, offensant ou biaisé. Le robot « ne vise pas à donner des conseils5. » Il signale d’exclure les renseignements sensibles, car tout dialogue peut être examiné. OpenAI a formé le robot afin d’éviter les demandes illégales, inappropriées, discriminatoires, racistes et xénophobes. Pour montrer son côté sombre, certain.e.s usager.ère.s l’ont déjoué à l’aide de questions hypothétiques, artistiques ou en lui demandant de contourner ses mesures de sécurité6.

Sur le plan juridique, le développement de tels outils — beaucoup plus rapide que les réformes législatives — soulève des enjeux importants en matière de propriété intellectuelle, de protection de la vie privée et de sécurité de l’information7. Interrogé quant aux enjeux de propriété intellectuelle le concernant, le robot en nomme trois :

  • la propriété des données d’entraînement du modèle, lesquelles peuvent inclure des textes protégés par le droit d’auteur ;
  • la propriété du modèle lui-même, qui peut correspondre à une œuvre protégée ;
  • l’utilisation du contenu généré, en tant qu’œuvre dérivée soumise aux mêmes lois que l’œuvre originale.

À ce titre, OpenAI cède tous ses droits, titres et intérêts sur le contenu généré par ChatGPT à l’usager.ère et lui transfère toute responsabilité découlant de son utilisation. En effet, l’usager.ère doit s’assurer que le contenu ne viole aucune loi applicable ou les conditions d’utilisation. Ces conditions interdisent notamment de présenter le contenu généré comme émanant d’un humain8.

Le robot se montre optimiste quant à son rôle pour l’avenir de la profession juridique. Il peut automatiser certaines tâches chronophages, dont la revue de documents, la recherche et la prise de contact avec la clientèle. Cette avancée favoriserait l’accès aux services juridiques, mais pourrait entraîner des pertes d’emploi, nuance-t-il. Encore loin de remplacer l’humain, du moins au Québec, ChatGPT inverse par exemple le contenu des Lois 96 et 25, toutes deux récemment adoptées. Le sort des juristes québécois.e.s n’est donc pas encore jeté.

  1. « ChatGPT: Optimizing Language Models for Dialogue », OpenAI, en ligne : https://openai.com/blog/chatgpt/.
  2. Alex Hugues, « ChatGPT: Everything you need to know about OpenAI’s GPT-3 tool », BBC Science Focus (4 janvier 2023), en ligne : https://www.sciencefocus.com/future-technology/gpt-3/
  3. « ChatGPT », OpenAI, en ligne : https://chat.openai.com/chat
  4. Ibid.
  5. Ibid.
  6. Kevin Roose, « The Brilliance and Weirdness of ChatGPT », The New York Times (5 décembre 2022), en ligne : https://www.nytimes.com/2022/12/05/technology/chatgpt-ai-twitter.html.
  7. Notamment, quant aux renseignements qu’il recueille auprès de son interlocuteur.trice.
  8. « Terms of Use », OpenAI, en ligne : https://openai.com/terms/, voir les clauses 2c)(v) et 3.