Être stagiaire en pleine pandémie

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Grégory Lancop

Cette dernière année fut particulièrement difficile pour nous tous et toutes. Du jour au lendemain, de nombreux avocats et avocates ont dû changer leur façon de travailler. Toutefois, pour certaines personnes, particulièrement les stagiaires du Barreau du Québec, il s’agissait d’une première expérience dans le milieu juridique. Pour savoir comment certains l’ont vécue, nous avons interviewé deux avocates qui ont fait leur stage lors de la pandémie COVID-19.

ania benzekri
Me Ania Benzekri est avocate en fiscalité et en droit des affaires au sein du cabinet LJT Avocats, où elle a fait son stage du Barreau. Bachelière en droit de l’Université de Montréal, Me Benzekri détient aussi une maîtrise en fiscalité de HEC Montréal. Préalablement à son stage chez LJT Avocats, Me Benzekri a effectué un stage dans la direction de la vérification des crédits d’impôt et de l’impôt minier de Revenu Québec. Elle a aussi été stagiaire en droit commercial à la Cour supérieure du Québec.
di hu
Me Di Hu s’est jointe au cabinet Hébert Miller Avocats après avoir complété son stage du Barreau au sein du contentieux de l’Agence du revenu du Québec. Sa pratique se concentre sur le litige civil et commercial ainsi que le droit des affaires. Diplômée en droit de l’Université de Montréal, elle y poursuit actuellement le programme de common law.

GRÉGORY LANCOP (G.L.)
Je tiens tout d’abord à vous remercier de nous avoir accordé votre temps aujourd’hui. Avant d’entrer dans le vif du sujet, pourriez-vous nous dire comment vous avez trouvé vos stages?

ANIA BENZEKRI (A.B.)
J’ai trouvé mon stage chez LJT Avocats pendant mon baccalauréat. J’ai ensuite fait mon Barreau à l’automne 2018 et complété ensuite une maîtrise en droit fiscal à HEC Montréal.

Mon stage devait commencer en juillet 2020, mais en raison de la pandémie, il a débuté en septembre 2020.

DI HU (D.H.)
J’ai trouvé mon stage pendant la pandémie, après mon examen du Barreau. J’ai débuté mon stage en août 2020. Il s’agissait d’un poste au contentieux de Revenu Québec et le stage faisait partie de leur processus régulier d’embauche.

G.L. Fort intéressant et assez unique! Me Hu, lorsque vous avez été embauchée, est-ce que votre bureau vous a prévenue des mesures déjà en place et de l’impact que la pandémie allait avoir sur le stage?

D.H.
Tout à fait, le contentieux avait déjà implanté des mesures en conséquence. Au début, on avait tous et toutes le droit de se rendre au bureau au choix, mais il fallait respecter un certain ratio de personnes sur place. J’y allais régulièrement, environ trois fois par semaine.

Cependant, lorsque les mesures ont été resserrées en décembre, on n’avait plus le droit de se rendre sur les lieux de travail. À la fin de mon stage, il s’agissait exclusivement de télétravail.

G.L. D’accord, comme pas mal d’avocat.e.s finalement! Et Me Benzekri, comme vous aviez trouvé votre stage avant le début de la pandémie, est-ce que votre bureau vous a contactée par exemple pour expliquer la situation et son impact sur les stages?

A.B.
Tout à fait. Le bureau m’a contactée d’avance pour m’informer de la situation, et que la date de début de mon stage allait être repoussée. Je dois dire que ça m’a pas mal rassurée qu’on me tienne au courant des avancements de la situation, vu les circonstances de la crise sanitaire.

G.L.
Concrètement, avez-vous senti les difficultés occasionnées par la crise sanitaire sur votre stage? Étiez-vous surtout en télétravail?

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A.B.
Quand j’ai intégré l’équipe de LJT, le bureau était déjà équipé pour le télétravail. Notre système informatique était adapté, tout était accessible pour nous à distance. On avait accès à l’équipement nécessaire pour travailler de la maison, si nécessaire. Que l’on soit en télétravail ou non, ça ne changeait pas grand-chose, finalement.

Quant aux mesures sanitaires, mon bureau était particulièrement rigoureux et en avance. Avant que certaines mesures sanitaires ne deviennent obligatoires, le bureau les avait déjà mises en place.

Pour les horaires, il y avait même une équipe qui s’occupait exclusivement des horaires des avocat.e.s pour savoir qui pouvait être au bureau.

Nous, les stagiaires, on avait la possibilité d’aller au bureau. Si on était là plus souvent, ça ne posait pas de problème, car on avait des bureaux fermés. On voulait nous donner la chance de rencontrer les différents membres du bureau.

Je ne suis pas la plus à plaindre, j’ai été chanceuse de la façon dont le stage s’est déroulé. Il y a certainement eu des changements au niveau de la socialisation au bureau. On avait par exemple moins la chance de participer aux activités avec les collègues. Le stage a été toutefois fort agréable comme expérience.

D.H.
De mon côté, les stagiaires n’avaient pas de bureaux fermés. Cependant, le bureau a pris le soin d’espacer nos cubicules pour que l’on ne soit pas côte à côte. C’est sûr que l’on voyait moins les gens, mais on croisait des avocat.e.s et le personnel malgré tout. Avant décembre, on se rendait quand même à la Cour en personne.

Le bureau nous a aussi bien équipés pour pouvoir faire du télétravail. On avait des plateformes comme Teams pour faciliter notre travail. La communication se faisait très bien, malgré la pandémie.

G.L.
Avant de clore cette entrevue, je souhaiterais vous entendre sur les leçons que l’on pourrait tirer de cette pandémie?

D.H.
C’est une bonne question. Il y a beaucoup de personnes qui me disent que ça devait être difficile de faire mon stage en pandémie, en télétravail, etc. Pourtant, pour moi, on dirait que c’était un peu la normale. Après tout, je n’ai connu rien d’autre et je n’ai pas connu ce que c’est qu’être en stage autrement.

Bien sûr, inconsciemment, je savais que ce n’était pas la « normale ».

A.B.
C’est tout à fait vrai, car on n’a pas de comparatif aux autres stages, après tout. Je me suis parfois demandé comment cela se serait déroulé sans pandémie, mais je ne me suis jamais sentie privée de mon stage. J’avais mes mandats et j’apprenais tous les jours. Au niveau du travail et du stage, ça n’a pas changé grand-chose.

D.H.
Je pense aussi que ce contexte particulier a démontré le potentiel des avocat.e.s de travailler à distance. En raison de la pandémie, on a été forcé de s’adapter par la force des choses et je pense que c’est une preuve que l’on peut penser notre façon de travailler et la profession autrement.

G.L.
 Des pistes qui mènent en effet à réfléchir. Merci beaucoup à vous deux et je vous souhaite une excellente carrière dans la profession.

A.B. et D.H. : Merci à vous.