La prémédiation familiale : une nouvelle corde à l’arc des Centres de justice de proximité

La rupture conjugale apporte son lot de difficultés au niveau affectif, émotionnel, matériel, financier et juridique pour un grand nombre de couples. Dans ce tumulte, la communication devient souvent difficile, au point où les seuls échanges finissent par se faire par avocat.e.s ou tiers interposés. Cela n’est pas sans conséquence, que ce soit sur les individus eux-mêmes ou sur les enfants du couple, lorsqu’il y en a.

Depuis le 1er janvier 2016, le Code de procédure civile prévoit à son article 1er une obligation pour les parties de considérer le recours aux modes privés de prévention et de règlement des différends avant de pouvoir s’adresser aux tribunaux. Si cette obligation est bel et bien inscrite dans la loi, cela constitue simplement pour de nombreux justiciables quelques lignes théoriques ajoutées à leurs procédures.

Forts de ce constat et dans le cadre du projet d’amélioration de l’accès à la justice, les Centres de justice de proximité (ci-après « CJP ») ont été désignés par le ministère de la Justice du Québec afin d’offrir un service gratuit de prémédiation en matière familiale.

LA PRÉMÉDIATION AU CJP, QU’EST-CE QUE C’EST?
La prémédiation est abordée sous l’angle de la préparation à la médiation. Les parties prennent le temps d’envisager les options qui s’offrent à elles afin de choisir celle qui sera dans leur meilleur intérêt.

Il s’agit d’un point de départ pour les couples, mariés ou non, avec ou sans enfant à charge, qui se séparent et qui souhaitent être orientés dans leurs démarches, notamment afin d’évaluer si la médiation, avec ses avantages et ses inconvénients, pourrait répondre à leurs besoins. C’est l’occasion pour chaque personne de s’informer et de s’outiller pour s’y préparer.

Ce nouveau service se veut complémentaire aux services offerts par les médiateurs. Au sortir de sa rencontre, la personne aura été informée sur le déroulement de la médiation et sur le rôle du médiateur, de même qu’éclairée sur la place de la confidentialité, de la transparence et de la bonne foi. Ainsi, l’entièreté des séances de médiation1 pourra être consacrée à la recherche d’options conduisant au règlement des conflits se présentant.

La rencontre de prémédiation n’est pas obligatoire et n’est nullement un prérequis pour s’engager dans un processus de médiation familiale. Ce service n’est pas là pour complexifier les démarches, mais pour orienter les citoyen.ne.s le plus tôt possible afin de rendre leur parcours juridique plus agile.

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LA RENCONTRE AVEC UN OU UNE JURISTE2
Lors de leur rencontre avec un ou une juriste du CJP, les citoyen.ne.s auront l’opportunité de recevoir de l’information sur la médiation. C’est d’ailleurs bien souvent l’occasion de démystifier le rôle des médiateur.trice.s et de déconstruire les préjugés existants pour ce mode de règlement des différends. Il est généralement constaté par les juristes que, bien qu’un grand nombre de personnes ait déjà entendu parler de la médiation, pour beaucoup l’image est erronée et les attentes sont souvent éloignées de ce qui est réellement entre les mains des médiateur.trice.s.

La rencontre est également le moment d’aider les justiciables à évaluer leurs besoins. Il s’agit de s’éloigner un instant des aspects juridiques pour comprendre, par exemple, qu’une demande financière peut être liée à un besoin de sécurisation de la famille ou qu’une réticence à un temps parental paritaire peut provenir d’un manque de transparence ou de communication. Les besoins de chaque personne sont généralement inconnus et inconscients. Prendre le temps d’en discuter une première fois, au moment de la prémédiation, facilitera le travail de réflexion, jusqu’au moment où le sujet sera abordé au cours de la séance de médiation.

Chaque citoyen.ne est également outillé.e afin de parler de la médiation avec l’ex conjoint.e, d’identifier les sujets à discuter en médiation, de trouver un.e médiateur.trice.s familial.e et, si besoin est, de recevoir de l’information juridique sur la séparation et ses conséquences juridiques.

UNE MEILLEURE RESPONSABILISATION DES CITOYEN.NE.S
Les CJP ne sont pas là pour promouvoir la médiation pour tous et toutes et à n’importe quel prix. Il demeure des situations et des besoins pour lesquels la médiation se révèlera inappropriée. En effet, le processus, bien que très efficace pour résoudre une partie des conflits à l’amiable, n’est pas une panacée et a ses limites. En revanche, pour les citoyen.ne.s qui choisissent d’y recourir, ce processus est un moyen de se responsabiliser en devenant les décideur.euse.s de leurs propres ententes et en prenant des décisions libres et éclairées. C’est en s’attelant à la tâche ensemble que les parties définiront des ententes satisfaisantes dans les moindres détails. Chaque élément pourra être adapté parfaitement à leur vie quotidienne, leurs besoins et leurs intérêts.

Il est généralement plus facile de respecter une règle que l’on a soi-même définie plutôt qu’une décision imposée par un tiers et dont il n’est pas toujours aisé de comprendre les tenants et les aboutissants à la première lecture.

La médiation est également l’opportunité de renouer le dialogue pour un grand nombre. C’est l’occasion de réapprendre à s’exprimer et à écouter l’autre partie tout en gardant l’esprit le plus ouvert possible. Cet apprentissage, utile aux moments des discussions, se révèlera également indispensable pour s’accorder dans le futur, lorsque la vie, apportant son lot de changements et d’inattendus, présentera une situation pour laquelle rien n’a été prévu initialement par les parties.

La préservation des relations futures avec l’ex conjoint.e est d’autant plus importante lorsque le couple a des enfants et qu’il sera amené à continuer d’échanger. Chaque personne, en étant mieux outillée, sera en mesure de dialoguer pour trouver une entente chaque fois que de nouvelles questions se présenteront.

  1. Une partie est subventionnée par le ministère de la Justice. Ministère de la Justice, Programme de médiation familiale, en ligne : https://www.justice.gouv.qc.ca/programmes-et-services/programmes/mediation-familiale.
  2. Les citoyen.ne.s peuvent consulter le site : https://avantlamediation.ca/ pour un complément d’information et contacter le CJP le plus proche de chez eux au 1 844 522-6900 afin de convenir d’un rendez-vous gratuit avec un ou une juriste.