Le coup de trop

Ce drame a relancé plusieurs débats tout autour du globe alors que l’on se questionne sur les procédures et précautions devant être mises en place préalablement à un combat afin de s’assurer de la protection des boxeur.ses et d’éviter des situations de la sorte. En effet, qu’en est-il de l’encadrement des sports de combat au Québec?

Considérant l’aboutissement dramatique du 2 septembre dernier, nous devons sérieusement nous questionner sur l’encadrement de la boxe au Québec. Une révision législative quant à l’administration, les protocoles de surveillance et les mesures de sécurité pourrait être envisagée, voire essentielle. Au Québec, les sports de combat sont encadrés par la Régie des alcools, des courses et des jeux (RACJ).

Le président de GYM, Yvon Michel, organisateur du Gala de boxe, a affirmé que les mesures habituelles et les protocoles ont été respectés et suivis préalablement au combat. Par suite des examens courants, aucun drapeau rouge ne laissait présager ce dénouement. Mais là se situe le problème! Seulement quelques mois avant le combat du 28 août 2021, la boxeuse mexicaine avait subi un violent K.-O. [Knock-Out] en mai 2021. À la suite de puissants coups à la tête, Zapata était effectivement restée pendant de longues minutes au sol.

La question à se poser est la suivante : Zapata était-elle pleinement rétablie de son dernier combat?  Esteban Zacarias, le père de l’athlète, a affirmé lors d’une entrevue avec le journal La Presse que cette dernière « était en parfaite santé et montrait une bonne discipline à l’entraînement. Elle se sentait capable de gagner le combat »¹. Le K.-O. qu’a subi Zapata lors de son combat précédent et le court délai que cette dernière a eu pour se rétablir aurait dû lever un drapeau rouge. Est-ce que quelques semaines sont réellement suffisantes pour guérir de tels impacts cervicaux? Les organisateurs de l’événement ont-ils été négligents dans leurs vérifications? Est-ce qu’ils se sont assurés que Zapata était en pleine santé?

Yvon Michel, président de GYM et organisateur du Gala de boxe du 29 août 2021, a fourni certaines explications :

La première chose qu’on regarde, c’est si elle est sur une liste de suspension, a indiqué Michel. Elle ne l’était pas. Elle avait subi un K.-O. Est-ce qu’elle avait subi les examens neurologiques adéquats? C’était le cas pour qu’elle reprenne son permis. De toute façon, aucun boxeur ne peut boxer au Québec sans avoir le permis de l’État ou du pays d’où il provient. En plus de ça, la régie exige un autre examen. Dans son cas à elle, pour avoir son permis au Mexique, elle a dû subir un examen cérébral, et pour pouvoir boxer ici, elle a dû en passer un autre.²

Le député libéral Enrico Ciccone, ancien joueur de la Ligue nationale de hockey, s’est exprimé sur la situation par le biais de la plateforme Twitter :

« Quelle tristesse ! Il faut absolument des consultations avec les partenaires du milieu de la boxe et les intervenants pour une meilleure sécurité dans les sports. De nouveaux critères s’imposent, tout comme une enquête du coroner »

Je ne peux qu’être en accord avec les propos du député. Une refonte du livre de règlements de la RACJ serait de mise afin de mieux encadrer les protocoles médicaux et la sécurité des boxeur.ses. N’ayant connu qu’une seule mise à jour depuis 1980, le sport a nettement évolué depuis. Nous avons désormais des rapports scientifiques démontrant clairement les effets néfastes des coups à la tête et des commotions cérébrales. À chaque fois qu’un.e combattant.e entre dans le ring, il met sa vie en danger. Je ne souhaite pas proposer de dénaturer ce sport, mais des actions concrètes doivent être prises afin de minimiser le risque et le danger pour les boxeur.ses d’avoir des répercussions sur leur santé à long terme.

À titre d’exemple, par suite d’un K.-O., une suspension de six mois pourrait être imposée aux boxeur.ses afin de s’assurer du rétablissement complet du cerveau. Également, faire des examens cérébraux et neurologiques plus approfondis afin de prévenir les risques éventuels.

Un autre point d’interrogation est le salaire que Zapata a reçu pour ledit combat. On parle d’aussi peu que 1 800 $. Il est important de comprendre que Zapata était en début de carrière. Il n’est pas rare de voir de petites bourses, lorsqu’un.e boxeur.se en est à ses premiers combats professionnels. De surcroît, un.e combattant.e est conscient.e des risques que la boxe présente. Malgré le violent K.-O. que Zapata a subi en mai dernier, son équipe et elle-même ont décidé de revenir sur le ring rapidement. Il ne s’agit pas d’imputer la faute à quelqu’un, mais plutôt de démontrer que les parties auraient pu opter pour un comportement plus prudent.

Par suite du décès de Madame Zapata, une enquête du Bureau du coroner a été ouverte afin d’enquêter sur « les causes probables et les circonstances » qui ont conduit au décès de cette dernière. L’enquête peut s’étirer sur plusieurs mois. Je suis persuadé que cet incident pourrait mener à une réforme des règlements de la RACJ afin de prévoir et d’établir des protocoles plus sécuritaires et des sanctions sévères dans l’éventualité d’un manquement.

À la famille de Jeanette Zacarias Zapata, sachez que je suis de tout cœur avec vous dans cette épreuve et veuillez recevoir mes plus sincères condoléances.