Le coût social de la pandémie

Depuis maintenant deux ans, nous naviguons à travers les méandres de la COVID-19 et le lot de mesures changeantes qu’elle apporte. Tristement, l’édition d’avril de l’Extrajudiciaire souligne les deux ans de cette pandémie… mais il ne saurait être meilleur moment pour parler de santé mentale. Si la COVID affecte directement la santé physique des gens, ses impacts négatifs sur la santé mentale de tous et chacun sont indéniables.

De façon très évidente, la COVID a engendré beaucoup d’isolement au sein de la population. Un isolement qui n’est certainement pas étranger à la détresse éprouvée par plusieurs personnes. Pensons aux enfants et aux adolescents qui sont à une période charnière de leur vie où l’amitié et ce besoin d’exister dans le regard de l’autre est si important. Il y a aussi les parents de ces jeunes qui, du jour au lendemain, ont dû apprendre à jongler entre télétravail et école à la maison ou la garderie à la maison pour les tout-petits. Tout un casse-tête qui peut rapidement mener vers l’épuisement! Et c’est sans compter les nombreuses périodes d’isolement ajoutées lorsqu’une éclosion a lieu dans la classe de l’enfant ou qu’un petit nez morveux nécessite une course au test PCR pour pouvoir poursuivre les activités régulières.

Pensons aussi aux personnes âgées, une tranche de la population très à risque qui, soit par choix pour éviter toute possibilité d’attraper le virus ou par imposition de mesures lorsqu’en CHSLD ou autre centre de résidence, ont été grandement isolées de tout contact avec leurs proches. Récemment un article de La Presse rapportait le résultat d’une étude qui révèle que les centres d’hébergement pour aînés qui ont appliqué de façon plus rigoureuse les mesures limitant les contacts entre leurs résidants et le monde extérieur sont aussi les centres qui ont connu le plus de décès dans les mois suivants le début de l’imposition de cet isolement. Ces décès ne sont pas dûs à la maladie, mais ont sans doute été accélérés par l’isolement, le sentiment de désespoir et l’absence de contact stimulant avec des proches.

Puis, il y a tous les travailleur.se.s, ceux et celles dont les emplois sont à la merci des mesures sanitaires comme les emplois dans le milieu de la restauration, de la culture, des loisirs et certains commerces de détail. Chaque fermeture ou restriction quant au nombre de clients ou aux heures d’ouverture a un impact financier certain sur ceux-ci occasionnant un stress accru. Il y a aussi les travailleur.se.s et professionnel.le.s dans le domaine de la santé qui sont surchargé.e.s de travail et d’heures supplémentaires depuis le début de la pandémie et qui font des pieds et des mains pour garder le système de santé à flot.

Je pourrais aussi parler de nous : les avocat.e.s. Certains domaines de pratique ont été affectés plus que d’autres par la pandémie. Je pense, entre autres, à tous mes collègues représentant le ministère public qui ont vécu au rythme des absences pour cause d’isolement, ou de retrait préventif, qui ont vécu et vivent toujours les conséquences de la surcharge des tribunaux causés par l’arrêt des audiences au printemps 2020 et de la pression toujours très existante des délais judiciaires (Merci Jordan!).

Tout ce beau monde, après deux ans de pandémie, ressent une réelle fatigue voire un épuisement face à tous les changements et désagréments qu’elle occasionne. L’insatisfaction générale face à tel ou tel aspect de la pandémie ou de sa gestion est palpable. Plus préoccupant encore, cette insatisfaction et cette fatigue amènent une certaine division au sein de la population, et cette division, malheureusement, laisse trop de place aux discours et idées de certains groupes extrémistes.

Plus que jamais, il importe d’être solidaire les uns envers les autres. Bien que nous ne soyons pas affectés par la pandémie au même degré ni de la même façon, nous traversons tous le même obstacle qu’elle représente. Ensemble nous sommes plus forts, ensemble nous sommes capables d’être à l’écoute de l’autre et nous bénéficierons des effets de cette solidarité sur notre bien-être et notre santé mentale. Serez-vous solidaire?