Impacts de la COVID-19 sur la protection de l’environnement au Québec

La pandémie de COVID-19 a eu d’importants impacts sur les activités économiques du pays. Tous les secteurs d’activités ont fait face à des défis de taille et les entreprises ont montré une grande résilience.

DES ADAPTATIONS NÉCESSAIRES À LA PRATIQUE DU DROIT DE L’ENVIRONNEMENT AU QUÉBEC
En réponse à ces défis, les autorités publiques ont tenté d’alléger le fardeau réglementaire des administrés et de préserver l’économie. En matière environnementale, le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (« MELCC ») a rapidement mis en place, et pour toute la durée de l’état d’urgence sanitaire, un régime d’autorisation particulier1 pour les entreprises qui souhaitaient modifier leur production habituelle en une production répondant aux besoins prioritaires de la pandémie.

En mars 2020, la plupart des délais de prescription et de procédure civile et pénale ont été suspendus, de même que les instances devant les tribunaux concernant, par exemple, des infractions pénales environnementales ou des recours en contrôle judiciaire des décisions du MELCC.

Cette situation d’urgence n’a toutefois pas justifié un relâchement des normes et des exigences environnementales. Au contraire, les entreprises restaient soumises aux interdictions générales de polluer ainsi qu’aux obligations de rapport et d’avis aux autorités environnementales. Pour sa part, le Centre de contrôle environnemental du Québec (« CCEQ ») a avisé les entreprises que les obligations de protection de l’environnement demeuraient, mais que ses inspections sur le terrain seraient limitées durant cette période.

À l’automne 2020, le gouvernement du Québec a publié le projet de loi no 66 intitulé Loi concernant l’accélération de certains projets d’infrastructure (« PL 66 »). Ce projet de loi, sanctionné le 11 décembre 2020, visait à accélérer la relance de l’économie par la mise en chantier de certains projets d’infrastructure ciblés, comme la construction de maisons des aînés, d’écoles, d’hôpitaux et de transports en commun, incluant la construction du Réseau de transport métropolitain et le prolongement de la ligne bleue à Montréal.

En matière environnementale, le PL 66 exempte les projets ciblés de l’obligation d’obtenir des autorisations environnementales en vertu de la Loi sur la qualité de l’environnement (« LQE »), à condition que l’initiateur du projet dépose une déclaration de projet au MELCC dix jours avant le début des activités. Cette exemption ne s’applique pas dans les cas où le projet implique un prélèvement d’eau et où les travaux liés au projet sont réalisés dans des milieux humides et hydriques, sur un ancien lieu d’élimination de matières résiduelles ou en présence d’une espèce menacée ou vulnérable. Le PL 66 prévoit également des aménagements à la procédure du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (« BAPE ») dans le cadre des audiences publiques qui seraient tenues pour les projets ciblés et assujettis à la procédure du BAPE.

Au niveau municipal, le 25 mars 2021, le gouvernement du Québec a sanctionné la Loi instaurant un nouveau régime d’aménagement dans les zones inondables des lacs et des cours d’eau, octroyant temporairement aux municipalités des pouvoirs visant à répondre à certains besoins et modifiant diverses dispositions, LQ, 2021, c. 7, aussi désignée comme le projet de loi 67 (« PL 67 »). Dans le contexte de la pandémie de la COVID-19, le PL 67 prévoit, sur une base temporaire, des pouvoirs spécifiques d’emprunt par les municipalités et des pouvoirs de dépenser pour venir en aide aux entreprises qui sont situées sur leur territoire. On y voit également refléter certains enjeux d’actualité comme l’accès public aux cours d’eau, aux îlots de chaleur, ainsi que certaines mesures temporaires qui obligent les municipalités à favoriser les entreprises québécoises et à exiger la provenance canadienne de certains biens et services dans leurs demandes de soumissions publiques.

UN CONSTAT EN DEMI-TEINTE POUR LA LUTTE CONTRE LES CHANGEMENTS CLIMATIQUES
En ce qui concerne les impacts de la pandémie de COVID-19 sur les changements climatiques au Québec, ceux-ci se font sentir notamment par divers changements d’habitudes menant entre autres à la redécouverte de la province par les citoyen.ne.s, à l’attrait pour le commerce local et à l’augmentation de la popularité de plusieurs sports et activités extérieurs.

Un des changements majeurs est la popularité grandissante du télétravail. À cet égard, le gouvernement du Québec a publié les résultats préliminaires d’une étude sur l’impact de la COVID-19 sur la qualité de l’air au Québec2 qui établissent un lien clair entre les mesures de confinement, imposant le télétravail pour la majeure partie des travailleur.se.s, et une diminution notable des concentrations dans l’air des principaux contaminants associés au transport routier. Dans son Plan pour une économie verte 2030 (« PEV 2030 ») adopté le 16 novembre 2020, le gouvernement du Québec déclare qu’il « veillera également à mesurer l’impact d’un déploiement structuré du télétravail des employés de l’État sur ses émissions de gaz à effet de serre »3.

Nous n’avons pu que constater la hausse de l’utilisation de plastique à usage unique, des déchets liés aux utilisations de masques jetables, les habitudes des consommateurs qui se sont grandement orientés vers les commandes de plats en livraison ou à emporter et le magasinage en ligne ;
le tout imposant un fardeau significatif sur les lieux d’enfouissement des matières résiduelles. Il sera donc intéressant de surveiller les impacts de l’entrée en vigueur des interdictions du nouveau règlement de la ville de Montréal, le Règlement interdisant la distribution de certains articles à usage unique (21-040), et le projet d’ajout, par le gouvernement fédéral, de plusieurs articles de plastique à usage unique à la Liste des substances toxiques de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999).

Cela étant, la reprise de l’activité économique participe inévitablement à un regain des émissions de gaz à effet de serre ayant temporairement chuté en 20204. Pour un grand nombre d’experts, la pandémie n’aura à long terme qu’un effet négligeable sur la protection de l’environnement5.

En effet, d’après le rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (« GIEC »), publié le 28 février 2022, la pandémie de COVID-19 a eu un impact substantiel sur les communautés urbaines et les adaptations climatiques, accentuant la part de la population vivant sous le seuil de pauvreté et donc plus vulnérable aux impacts du changement climatique6. Ce rapport souligne toutefois les opportunités d’adaptations climatiques qui existent dans le cadre de la redéfinition des priorités et plans d’action post-pandémie7, lesquelles sont d’ailleurs plus amplement détaillées dans le dernier volet rapport du GIEC publié le 4 avril 20228 et seront certainement sources d’inspiration des autorités publiques québécoises dans la définition de leurs politiques de protection de l’environnement.

  1. https://www.quebec.ca/entreprises-et-travailleurs-autonomes/soutien-covid-19/conversion-dactivites-industrielles-covid-19
  2. https://www.quebec.ca/agriculture-environnement-et-ressources-naturelles/covid-19-environnement/impact-qualite-air-quebec-covid-19
  3. Gouvernement du Québec, Plan pour une économie verte 2030, p. 45.
  4. Intergovernmental panel on Climate change, Climate Change 2022: Mitigation of Climate Change, April 4, 2022, TS-14.
  5. Environnement et Changement climatique Canada, Plan de réduction des émissions pour 2030 : un air pur, une économie forte, 4 avril 2022, p. 239;
  6. Intergovernmental panel on Climate change, Climate Change 2022: Impacts, Adaptation and Vulnerability, Full report, February 28, 2022, 6-72.
  7. Ibid., 3-131; 3-140.
  8. Intergovernmental panel on Climate change, Climate Change 2022: Mitigation of Climate Change, April 4, 2022, TS-126, 1-18, 1-19, 1-20